La couleur « rouge carmin » est extrait de la cochenille, petit insecte qui se développe sur les cactus et qui enquiquine les jardiniers. Mais qui fait aussi bouillir la marmite d’agriculteurs spécialisés dans sa production.
Avec la colonisation des Amériques, les envahisseurs européens ramènent du Mexique la puce Cochenille qui était prisée par les Aztèques et qui produit un très joli rouge. Cet insecte apprécie tout particulièrement les figuiers de Barbarie. Auparavant en Europe, c’était les cochenilles kermès qui étaient utilisés pour produire le carmin véritable. À partir du premier quart du 16ème siècle, l’espèce cousine du Mexique commença a être élevé en Europe et notamment aux Canaries.
La cochenille est donc un petit insecte de forme arrondie qui, pour se protéger, produit de l’acide carmique. Cet ether rouge est l’agent colorant du rouge carmin.
Un élevage traditionnel
Les femelles viennent sucer la sève des figuiers de barbarie pour se nourrir. Aux Canaries, notamment sur Lanzarote, des champs de figuier servent de support aux cochenille. Cette industrie remonte au 17ème siècle. La figue de Barbarie (le fruit) est comestible et sert à faire des confitures mais c’est surtout depuis le milieu du 19ème siècle que les cochenilles sont venues infester les plantations. Infestation est un terme un peu fort : l’homme a volontairement implanté la cochenille sur les figuiers et le fait encore de nos jours.
Les femelles sur le point de pondre sont disséminées sur les figuiers. 2 mois plus tard, avec un outil en métal ressemblant à une cuillère, les insectes qui se sont multipliés sont récupérés et mis à sécher au soleil. Cela prend de 10 à 20 jours. Les insectes séchés sont alors broyés ou ébouillantés pour extraire la couleur. L’ensemble obtenu est ensuite filtré puis stocké dans des sacs respirants en attendant d’être vendu et expédié. Chaque années, 3 à 4 productions peuvent s’enchaîner.
La production est un travail de fourmis : la récolte est manuelle et il faut 3500 grammes de cochenilles pour obtenir 1000 grammes de colorant. Sachant qu’un insecte pèse 0,5 gramme, la récolte est longue et fastidieuse.
Un colorant très répandu
Aujourd’hui, le rouge carmin est aussi connu sous son nom de code E120. Il est utilisé notamment en cosmétique, en pharmacie, dans les bonbons, le fromage, le saucisson, les yaourts… Par rapport à d’autres colorants, il a l’avantage d’être peu allergène et issu de la nature et donc en accord avec les attentes des consommateurs sensibles aux produits naturels. Pour les végétariens et les végétaliens, exit donc les produits à base de E120. La betterave (E162) est à préférer pour ces régimes alimentaires.
L’industrie de la cochenille aux Canaries
Les Canaries produisent toujours des cochenilles pour l’industrie des colorants même si l’essentiel de la production vient du Pérou. Ce n’est pas toujours été le cas. Entre le milieu et la fin du 19ème siècle, les Canaries étaient le fournisseur mondial incontesté. L’arrivée des colorants artificiels a brusquement stoppé la production qui a faillit disparaître durant le 20ème siècle. Focalisé depuis sur la qualité, les producteurs de cochenilles des Canaries récoltent chaque année et stockent pour vendre lorsque les prix sont haut. Une appellation d’origine (AOP Cochenille des Canaries) permet aussi de valoriser un cahier des charges spécifique et exigeant.
L’activité n’assure pas une rentabilité importante et les producteurs de cochenilles doivent diversifier leurs activités (tourisme ou autres productions agricoles). Les principaux centre de production se trouvent au nord de Lanzarote.