San Borondón est une plage sur l’île canarienne de Gran Canaria ainsi qu’un mirador sur La Palma. C’est surtout une légende : la légende d’une neuvième île dans l’archipel des Canaries.
La croyance était tellement forte au Moyen-Âge que l’île apparaît même sur les cartes d’époque. Évidement, il n’y a pas de neuvième île. Les sources situent celle île tantôt à proximité de La Gomera tantôt bien plus à l’Ouest plus de 500km après la plus éloignée des îles du continent. Sur les cartes, l’île de San Borondón est vaste : plus de 460km de long pour 150km de large. Cerclée de montagnes et de falaises rendant son accès difficile, elle serait recouverte de végétation, mais en permanence masquée par la brume.
Au 6ème siècle, un moine irlandais et navigateur talentueux sillonnait l’Atlantique nord avec une petite embarcation de type currach pour apporter la bonne parole aux peuples des îles et notamment ceux des îles Fortunées (le nom donné aux Canaries alors). Un jour dans les années 530, Saint Brendan de Clonfert est missionné pour retrouver un fils disparu. Avec un petit équipage, ils cherchent pendant 7 ans jusqu’à trouver une île qui plonge et refait surface régulièrement : c’est l’île Poisson ou l’île Baleine. Profitant d’une halte sur l’île, cette dernière se met à se déplacer et emmène l’équipe de sauveteurs jusqu’à l’île fantôme. L’île Poisson disparaît alors et laisse le moine face à l’île mystérieuse qui prendra son nom (San Borondón = Saint Brenda). Suivant les récits, l’île Poisson est parfois l’île de San Borondón.
Si le récit de Saint Brendan est surtout un récit symbolique, il ne fait pas de doute qu’un marin de haute mer l’a écrit ou a voyagé au Moyen-Âge sur un bateau d’époque. Le récit du Voyage de Saint Brendan était célèbre et on en compte plusieurs centaines dans les bibliothèques européennes sans compter les traductions.
En 1479, l’île fait partie d’un traité entre les puissances du Portugal et de l’Espagne officialisant la possession de ces terres aux Canaries et attribuant ainsi à un pays une île que personne n’a jamais pu retrouver ! Plus tard au 16ème et 17ème siècles plusieurs expéditions à but colonial sont organisées par des navigateurs des Canaries et du Portugal. Régulièrement, des illuminés ou des marins pris dans la tempête affirment avoir vu ou accosté sur l’île mais aucun n’a pu rapporter de preuves ou indiquer le chemin pour la retrouver. Plus récemment, une photo datée du milieu des années 50 et une vidéo du début des années 2000 sont censées attester l’existence de l’île.
L’île de San Borondón n’a, bien sur, jamais été trouvée et l’explication est somme toute assez banale : c’est une fata morgana, phénomène optique qui se produit sur mer et qui donne l’impression de voir des bateaux ou des terres flotter au-dessus de l’océan au loin. Cette sorte de mirage causée par une inversion de température à la surface de l’eau déforme les éléments se trouvant à l’horizon à la façon d’une lentille réfrigente. On semble distinguer des falaises au loin. Le phénomène s’observe le matin après qu’il ait fait froid dans la nuit lorsque la mer est calme.
Les îles portuguaises de Selvagends à 160km au Nord de Tenerife pourraient correspondre à certaines représentations de l’île de San Borondón datées de la Renaissance. Elles seraient l’image à l’origine de la fata morgana.
Les habitants des Canaries restent malgré tout attachés à cette légende. Elle fait partie du folklore des îles Canaries et est présente dans les récits, les chansons et les peintures des insulaires.